mardi 7 février 2012

Jenny Alpha, une grande voix s’est tue La disparition de cette figure emblématique de la culture créole procure une vive émotion...


La doyenne des artistes français s'est éteinte à l'âge de 100 ans, le 08 septembre 2010. La place exceptionnelle qu'occupait cette grande dame du spectacle dans nos coeurs, son combat pour la reconnaissance de la culture créole et ses incroyables talents de comédienne et de chanteuse ont été célébrés à travers un trophée d'Honneur décerné le 21 septembre 2009 lors de la 4ème cérémonie des Trophées des Arts Afro-Caribéens. Aujourd'hui, une icône de la Martinique s'en est allée rejoindre ses amis d'antan, Duke Ellington, Aimé Césaire, Joséphine Baker...

Sa vie, ses oeuvres, ses combats

La pochette de son dernier CD
©Fnac.com

Née en avril 1910 en Martinique dans une famille aisée et cultivée, elle pose ses valises dans la capitale parisienne en 1929, âgée de 19 ans, et avec l’ambition de faire ses études supérieures à la Sorbonne afin de devenir professeur de lettres. Elle sera finalement comédienne, chanteuse et croisera sur sa route de grands noms du jazz et du music-hall. Après les clubs de jazz, sa vraie naissance au théâtre avait commencé en 1984 dans La folie ordinaire d’une fille de Cham de l’écrivain antillais Julius Amédée Laou. A 94 ans, elle répétait encore La Cerisaie de Tchékhov, mise en scène par le haïtien Jean-Pierre Lemoine. En 2008, à 98 ans, elle avait enregistré un nouveau disque La sérénade du muguet. Elle traversa le siècle en fréquentant Desnos, Dalí, Duke Ellington et les grands auteurs martiniquais, tel qu’Aimé Césaire, qui l'initia au concept de la négritude. Ce n’est qu’à un âge avancé que Jenny Alpha, déjà gloire martiniquaise, éternelle militante de la créolité, put interpréter des rôles à sa mesure au théâtre et au cinéma. Après la seconde guerre mondiale, pendant laquelle elle s'engage dans la Résistance, elle consacra toute son énergie, tout son talent, à la défense et à la reconnaissance de la culture créole, alors même qu'Aimé Césaire et Léopold Sédar Senghor se faisaient les chantres de la négritude, rappelle le ministre de la culture, Frédéric Mitterrand, en lui rendant hommage. Elle rencontrera ces homologues artistes à Paris lors du premier congrès des écrivains noirs en 1956. Elle aura été ainsi avant l'heure, une très belle figure de la diversité qui fait la richesse de la France actuelle, une France qu'elle aura servie aussi avec un grand courage en s'engageant dans corps et âme pour la Résistance.

Des hommages et une profonde émotion

Jenny Alpha, une créole d'exception
©Blogpost.com

L'annonce de sa mort a suscité de nombreuses réactions à Paris et en Outre-mer. La ministre de l'Outre-mer, Marie-Luce Penchard, a salué la femme d'exception et de talent qu'a été Jenny Alpha, le délégué interministériel Patrick Karam le talent et l'élégance d'une des plus grandes artistes ultramarines du XXe siècle. Le maire PS de Paris, Bertrand Delanoë, en déplacement aux Antilles, a rendu hommage à une pionnière dans le domaine des arts et qui a fait de sa vie un combat pour que la femme noire y ait toute sa place. Jean-François Lamour et Philippe Goujon, les deux députés UMP du XVème arrondissement parisien où vivait l’artiste, ont estimé qu’elle incarnait avec panache la richesse de la vie culturelle française du XXème siècle, au carrefour de multiples influences. Dans un télégramme envoyé à sa soeur, le président PS du conseil général de Martinique, Claude Lise a salué le parcours exceptionnel d’une artiste hors normes, et au talent triomphant de toutes les difficultés et de tous les préjugé.


Kelly BRUNOIR
http://noiraufeminin.com

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