Nago Seck, Sylvie Clerfeuille
Elle a « balayé » les tabous de sa tradition pour jouer du mbira réservé aux hommes. Elle l’a électrisé pour le moderniser.
Stella Chiweshe a tenté de faire connaître en Europe le mbira, rythme tiré de l’instrument du même nom, appelé dans d’autres pays sanza, lukeme ou merimba. Au Zimbabwe, le mbira est souvent accompagné du hosho, sorte de maracas faits de courges séchées.
Le rôle fondamental du musicien de mbira au Zimbabwe, est d’appeler les esprits dans les rituels de procession Bira. A travers l’instrument, on honore l’âme des ancêtres qui peuvent ainsi réapparaître pour donner des conseils et insuffler de l’énergie aux membres de la famille encore vivants. Lorsqu’il joue pour les esprits, le musicien doit travailler plusieurs jours et plusieurs nuits et adopter un mode de vie respectant les valeurs traditionnelles.
Stella commence la musique en 1966 initiée à Harare puis à Mhondoro par son oncle. Différent des autres musiciens qui pensent que les femmes ne doivent pas apprendre à jouer du mbira, un instrument d’hommes (ils ont peur qu’en jouant de cet instrument la femme développe des qualités masculines), il l’encourage dans sa passion.
La « maridzambira »
Elle commence comme les autres « maridzambira » (joueurs de mbira) à jouer pour les esprits et anime toutes sortes de cérémonies. Avant l’indépendance, il était interdit de jouer sur scène le mbira : les missionnaires le nommaient l’ « œuvre de satan » et menaçaient ses interprètes de l’enfer. L’indépendance venue, le gouvernement donne l’autorisation officielle de jouer de cet instrument.
Devenue membre de la compagnie nationale de danse du Zimbabwe où elle utilise ses dons de danseuse et de comédienne. Stella fait aussi ainsi le tour du monde. Sa carrière musicale est, elle-aussi, un succès : elle enregistre plus de vingt albums dans son pays natal dont un disque d’or, « kasahwa »
Le mbira électrisé
Sa première tournée musicale européenne a lieu au milieu des années 80 en qualité de « guest-star » de son compatriote Thomas Mapfumo.
Installée en Allemagne depuis cette date, Stella Chiweshe participe, au printemps 1987, au Beat Apartheid Road Festival. Son répertoire très riche sert souvent d’introduction aux sessions parlementaires ou aux discours télévisés du président zimbabwéen.
Toujours à l’affût de la modernisation du mbira traditionnel avec son groupe « earth-quake », Stella conserve néanmoins la base traditionnelle rythmique, utilise un hosho et un mbira électrisé. Elle y introduit un nouveau style de jeu des marimbas et inclut une section batterie-basse.
« Le mbira, c’est un sentiment plus fort que les mots. La souffrance que ce rythme réussit à soulager, aucun docteur ne peut le remplacer »
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