lundi 6 février 2012

Le NEPAD favorable aux droits des femmes

Afrique Renouveau Hors-Série Femmes

L’initiative continentale encourage la parité

NEPAD acknowledges that women play the predominant role in food productionLe NEPAD reconnait que les femmes jouent un rôle prédominant dans la production alimentaire.
Photo: Photo ONU / Christopher Herwig

En 2001, lorsque les chefs d’État africains ont présenté pour la première fois leur plan de développement, le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), les associations de femmes se sont mobilisées pour protester contre le fait que cette initiative ne tenait pas compte des questions de parité des sexes. Elles ont exigé que les architectes du NEPAD veillent à ce que les femmes ne soient pas exclues des avantages sociaux et économiques que promettait l’initiative.

Mme Litha Musyimi-Ogana, militante des droits des femmes, était au premier rang de ces revendications. « J’avais entre les mains le document fondateur du NEPAD, se souvient-elle, et j’ai immédiatement consulté les objectifs, et le deuxième objectif prônait l’autonomisation des femmes. Cela m’a enthousiasmée. Ensuite, j’ai feuilleté le document pour trouver un plan d’action qui explique concrètement ce que le NEPAD ferait pour les femmes, en vain. »

Mais l’activiste fait désormais partie de la structure de gestion du NEPAD. Elle dirige le Groupe de la parité des sexes et des organisations de la société civile formé en 2004 pour défendre le statut des femmes dans la politique, les programmes et activités du NEPAD. Ce groupe a été créé en réponse directe aux recommandations d’associations de femmes et d’organisations de la société civile notamment.

« Notre slogan lors des protestations était : si vous trouvez que quelque chose manque, il faut y remédier », se souvient Mme Musyimi-Ogana. « Se plaindre ne suffit pas. La déclaration du NEPAD était loin d’être parfaite, mais j’y ai vu un certain engagement et un certain enthousiasme. C’est la première fois que les chefs d’État s’engagent de leur propre initiative en faveur de l’Afrique. C’est historique. Je me suis dit que j’allais soutenir cette vision et changer les choses de l’intérieur si besoin était. »

Suivi des lois

Dans le cadre de l’une des initiatives les plus novatrices du NEPAD, le mécanisme d’évaluation intra-africaine, les gouvernements africains examinent périodiquement les politiques et pratiques des pays participants afin d´évaluer les progrès réalisés en matière de démocratie, de bonne gouvernance et de gestion économique. Entre autres indicateurs, les pays participants doivent indiquer les mesures qu’ils ont prises pour promouvoir et protéger les droits des femmes, ainsi que les lois et autres dispositions qu’ils ont adoptées pour accroître la participation des femmes à la société. Ils sont également tenus de citer à l’appui de leur bilan le pourcentage de femmes occupant notamment des postes de décision ou des sièges au parlement. Selon Anne Marie Goetz, experte des questions de paix et de sécurité à ONU-Femmes, le Rwanda a montré l’exemple en ce qui concerne le nombre de femmes élues au parlement. La constitution stipule que 30 % au moins des députés doivent être de sexe féminin, mais grâce au soutien important apporté aux femmes candidates lors des élections, les femmes détiennent maintenant 56 % des sièges.

D’après un rapport d’évaluation du NEPAD publié en 2006, le Rwanda a, en plus des dispositions constitutionnelles, « créé une multitude d’institutions et de programmes de développement visant à améliorer la condition et la situation des femmes de tous les milieux. » Mais le rapport note aussi que les femmes se heurtent encore à de nombreux obstacles. Des évaluations semblables, assorties de propositions visant à améliorer la situation des femmes et les possibilités qui leur sont offertes, ainsi que d’autres recommandations ont également été menées dans plus d’une douzaine d’autres pays africains.

Débloquer des budgets

D’après l’Union interparlementaire (UIP), 19,4 % en moyenne des sièges des parlements en Afrique subsaharienne sont détenus par des femmes, ce qui est proche de la moyenne mondiale de 19,3 %.

« Il est essentiel que les femmes accèdent à des postes importants, indique Mme Goetz. Les femmes qui occupent les fonctions publiques ont tendance, en général, à être plus sensibles aux besoins de leurs concitoyennes ». Cependant, la capacité des femmes élues à apporter un changement réel dépend de l’importance de leur parti et de leur influence en tant que parlementaires. Occuper un poste important dans le gouvernement n’est pas nécessairement synonyme de pouvoir. Il est décevant, constate l’UIP, que les femmes demeurent moins nombreuses que des hommes à diriger un ministère de l’économie ou à représenter au plus haut niveau leur pays sur la scène internationale.

« La question des femmes ne cesse de revenir », constate Augustin Wambo, expert en politique agricole du NEPAD. Il estime qu’il ne servira à rien d’avoir de nobles objectifs tant que les dirigeants n’auront pas pris conscience des besoins des femmes. Quel que soit le nombre d’engagements pris, souligne-t-il, si nous ne convainquons pas les législateurs de débloquer des budgets et de mettre en place les moyens et politiques nécessaires pour soutenir les femmes, l’initiative ne donnera pas de résultats. »

D’après le Programme détaillé pour le développement de l’agriculture africaine (PDDAA) publié en 2003 par le NEPAD « une attention particulière doit être accordée au rôle essentiel que jouent les femmes en matière de production alimentaire et de création d’entreprises dans les communautés rurales et urbaines d’Afrique ». Le PDDAA ajoute que « les Africaines sont à l’origine d’une partie importante de la production dans les secteurs informel et formel », tandis que les femmes chefs d’entreprise « investissent non seulement dans leurs activités commerciales mais privilégient également les investissements sociaux réalisés dans leur communauté. »

On estime que, dans la plupart des pays africains, les femmes produisent plus de la moitié des denrées alimentaires. Des études réalisées par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) ont cependant établi que, bien que les femmes jouent un rôle prépondérant en matière de sécurité alimentaire, il leur est difficile, en raison des lois en vigueur et des coutumes traditionnelles, de posséder des terres ou d’obtenir des crédits. De même, les femmes ne profitent que d’une infime partie des formations professionnelles fournies par les institutions agricoles.

Réseaux et groupes de réflexion

Pour que les questions concernant les femmes soient mieux prises en compte dans les politiques et programmes, le personnel du NEPAD consulte des experts dans tous les secteurs. En 2005, par exemple, lors d’une réunion organisée par le Réseau des femmes africaines pour le développement et la communication (FEMNET), basé au Kenya, des représentants d’une quarantaine de pays ont demandé que soit mise en place une structure de gestion des questions de parité des sexes et de société civile.

À l’issue de nouvelles consultations, le Groupe de réflexion des organisations de la société civile, qui réunit 60 spécialistes des questions de parité entre les sexes de toutes les régions de l’Afrique, a été créé cette même année. Ses membres sont des spécialistes des divers secteurs prioritaires du NEPAD, tels que l’agriculture, l’éducation, les transports et la santé. Ces experts collaborent avec les femmes sur le terrain et comprennent donc mieux ce dont elles ont le plus besoin.

Selon Roselynn Musa, membre du Groupe de réflexion et administratrice de programmes à FEMNET, cette volonté de consulter des spécialistes prouve que les dirigeants africains comprennent désormais que les objectifs du NEPAD ne pourront être atteints que si les femmes et les filles peuvent y participer à part entière.

« Ce groupe de réflexion montre que les dirigeants du NEPAD ont pris conscience des lacunes qui existaient dans leur démarche initiale, a déclaré Mme Musa à Afrique Renouveau. Ils essaient maintenant d’y remédier. » Par son impact positif sur la vie quotidienne des Africaines, ajoute-t-elle, le NEPAD deviendra ainsi plus crédible et pertinent.   


Source : "Afrique Renouveau, ONU".

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