« Parité et égalité professionnelle, comment impliquer les hommes ? » Le directeur de l'Observatoire de la Parentalité en Entreprise propose au gouvernement des pistes pour « un nouveau contrat social entre hommes et femmes », qui passe par une meilleure reconnaissance de la paternité.
« En 2012, nous fêterons le 250ème anniversaire de la publication du Contrat social de Jean-Jacques Rousseau », remarque Jérôme Ballarin. Il est temps d'envisager « un nouveau contrat social entre hommes et femmes, en particulier dans le monde professionnel », prône le directeur de l’Observatoire de la Parentalité en Entreprise, en exergue de son rapport, remis jeudi 2 février à Claude Greff. La secrétaire d’État chargée de la Famille veut y voir « un moment important ».
En septembre, Jérôme Ballarin avait été missionné pour enquêter sur les bonnes pratiques favorisant la parentalité masculine et en suggérer de nouvelles. Son rapport, intitulé « Parité et égalité professionnelle, comment impliquer les hommes ? », préconise 10 bonnes pratiques (voir en bas de page). Dans un monde professionnel « créé par et pour les hommes », il faut qu'une majorité d'entre eux « impulsent et accompagnent les changements organisationnels et culturels nécessaires », assure Jérôme Ballarin.
Les quatre premières propositions s’articulent autour de la nécessaire transformation culturelle dans le monde de l’entreprise, une « machine à reproduire les stéréotypes », note le rapport. Idée fausse d'une égalité désormais acquise entre hommes et femmes dans le travail, quolibets sur les horaires aménagés ou encore déni de l’engagement paternel auprès de l’enfant… Autant de clichés solidement ancrés et qu’il faut combattre. A ce titre, le rapport propose notamment l’organisation d’une journée annuelle de la Famille en Entreprise. Déjà testé en 2010 et 2011 avec certaines entreprises partenaires, cette opération propose de faire découvrir aux enfants le lieu de travail de leurs parents. Objectif, humaniser les relations entre les équipes : un collègue de travail peut aussi être un parent.
Le patronat doit jouer le jeu
L’évolution des mentalités passe également par une adaptation de l’entreprise à la parentalité masculine. « Avant de demander aux pères de s’impliquer, il faut leur en donner les moyens », explique Claude Greff. C’est le sens des six dernières propositions. En premier lieu, il est nécessaire de permettre aux pères de s’investir pendant la grossesse. L'entreprise doit accompagner une nécessaire « révolution conjugale », souligne Jérôme Ballarin. Temps partiel, télétravail ou encore flexibilité des horaires, ces propositions sont étroitement liées à la transformation culturelle précédemment évoquée.
La naissance d'un enfant ne doit pas non plus être occultée. « Il faut allonger la durée du congé paternité à un mois, contre 10 jours actuellement », affirme Jérôme Ballarin qui propose également un congé parental plus court et mieux rémunéré, ou encore de rémunérer les absences des pères liées aux examens prénataux.
Les managers ont également un rôle prépondérant à jouer. D’une part pour appliquer ces mesures, d’autre part pour accepter et favoriser ces changements. Quatre femmes sur dix redoutent d’annoncer leur grossesse à leur supérieur. Et c’est sur le terrain de la formation que le rapport propose d’agir. Enfin, la finalité de ces bonnes pratiques s’exprime dans une meilleure mixité au sein de l’entreprise. Une réelle égalité entre hommes et femmes permet d’améliorer les performances économiques ; chacun étant parfaitement concerné et épanoui dans son travail.
La contrainte électorale
De bonnes intentions pour de bonnes pratiques, et après ? En juin dernier, en recevant le rapport de Brigitte Grésy qui préconisaitune réforme des congés parental et d'accueil de l'enfant afin de mieux impliquer les pères, Roselyne Bachelot se montrait tout aussi volontariste que sa secrétaire d’État aujourd'hui. On n'a rien vu venir.
Et s'ajoute encore désormais la contrainte temporelle. L’application de ces bonnes pratiques va demander de longues négociations avec le patronat, sans assurance de succès. Si 350 entreprises, signataires de la charte de la Parentalité en Entreprise, s’engagent déjà à appliquer ces recommandations, nombreuses sont celles qui ne vont y voir qu’un feu de paille. La possibilité d’un changement de majorité en mai prochain rend les initiatives gouvernementales quelque peu caduques
Et ce n’est pas la remise du rapport de Jérôme Ballarin à l’Association Nationale des Directeurs de Ressources Humaines (ANDRH) le 14 février qui va bouleverser la donne. Sans un appui fort du gouvernement à venir, quel qu’il soit, ces propositions ont peu de chances d’aboutir.
Pour aller plus loin :
- Le rapport en intégralité (166 pages) fournit également les témoignages de « 12 hommes qui font bouger les lignes ».
• Bonne pratique n°1 : Faire évoluer les stéréotypes de genre
• Bonne pratique n°2 : Faire reculer la culture du présentéisme
• Bonne pratique n°3 : Faire reconnaître l’engagement paternel dans l’entreprise
• Bonne pratique n°4 : Faire organiser la Journée annuelle de la Famille en Entreprise
• Bonne pratique n°5 : Faire grandir le congé de paternité et le congé parental masculin
• Bonne pratique n°6 : Faire recourir les hommes au temps partiel
• Bonne pratique n°7 : Faire émerger le concept de « flexibilité positive »
• Bonne pratique n°8 : Faire croître le télétravail
• Bonne pratique n°9 : Faire éclore les managers « bio »
• Bonne pratique n°10 : Faire prendre conscience aux dirigeants du lien entre mixité et performance économique
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