Au début du 19ème siècle, alors que le Danemark et l’Angleterre peinaient à faire cesser le commerce des esclaves, Tinubu, une jeune fille Yoruba, de la tribu Egba au sud ouest de Lagos apprit l’art de la négociation.
Petite fille, Tinubu accompagnait fréquemment sa mère sur les marchés, pour vendre aux voyageurs de la bouillie de maïs.
Jeune fille elle décida de partir pour Badagry pour tenter sa chance dans le commerce car le port de Badagry était l’un des derniers bastions de la traite clandestine à destination de Cuba et du Brésil. Tinubu commença donc à vendre du tabac puis n’étant pas satisfaite de ses rentes, elle se proposa de devenir intermédiaire entre les négriers et les chasseurs d’esclaves. Les uns et les autres acceptèrent son offre car il était de plus en plus difficile de se pourvoir en esclaves. Tinubu ne tarda pas à prospérer car ses clients lui consentaient des avances sur livraisons.
Pendant ce temps à Lagos une querelle de rois poussa le monarque légitime, Akintoye, hors de sa cour. Le roi déchu se retrouva donc à Badagry, où il reçut en 1846, la visite Tinubu, la puissante commerçante de la ville. La répression de la traite étant plus affirmée, Tinubu joua la carte du soutien pour se reconvertir en conseillère du roi. Avec son réseau et son argent elle aida le roi à reconquérir son trône. Ce qui fut fait en 1851.
Nouvelle conseillère attitrée de Akintoye, elle renfrorça par ailleurs son affaire en organisant l’exportation de l’huile de palme vers l’Europe et les Amériques. Acivité qui lui valut une réputation de femme d’affaires hors pair et qui lui permit de contrôler tout un réseau d’import-export à partir du port de Baadagry. Elle devint ainsi gênante pour les britanniques et le consul de l’époque, Sir Campbell se mit en tête de l’écarter coute que coute.
Par des manœuvres, de manipulation en manipulation, en passant par le chantage et les menaces d’attaque sur Lagos, Sir Campbell essaya de convaincre Akintoye de chasser Mme Tinubu de Lagos, sans grand succès. Le climat à Lagos était tel que les autochtones ne supportaient ni l’ingérence des britanniques dans les affaires du Nigéria ni le retour des métis afro brésiliens ou afro cubains, ceux-ci ayant plus de moyens que les lagosssiens.
Voulant mettre fin à ces conflits, Akintoye arrêta des rebelles parmi lesquels, le mari de Mme Tinubu. Irritée celle-ci se rangea pour la cause nationaliste et se révéla fine harangueuse des foules. Harcelé par le consul britannique, Akintoye finit par signer l’arrêté d’expulsion de Mme Tinubu. Elle quitta Lagos sous bonne escorte pour s’installer à Abéokuta.
Elle y développa un commerce d’armes et eut parmi ses clients les plus fidèles, le roi Ghézo du Dahomey, l’ennemi juré des Egbas.
Sitôt formée l’équipe d’employés affectée à ses affaires, Madame Tinubu revint à sa véritable passion : la politique. Dans la résidence cossue où elle tenait salon, se pressait toute l’élite « lagossienne » d’Abeokuta, mécontente de l’immixtion croissante des Anglais dans leur pays. De leurs débats passionnés, était en train d’émerger un ferment de contestation au régime de Lagos accusé de faiblesse envers les étrangers.
Tinubu organisa la résistance contre l’invasion d’abeokuta par les rois Ghézo et Ghézo du Dahomey. Grâce à elle et à ses conseils, la population d’Abeokuta fit un cinglant échec aux terrifiantes amazones du Dahomey par deux fois, d’abord avec Ghézo en 1851 puis avec Glélé en 1864. à la fin des combats en 1864, les femmes Egbas avec Tinubu formèrent une haie d’honneur aux survivants d’Abéokuta en criant : « Muso, Muso ».
Mme Tinubu fut ainsi élevée au rang d’ Iyalodé, « première femme de la cité ». elle fut la première femme à devenir membre politique du conseil des chefs. Tinubu mourut en 1887 sans enfants.
Vous pouvez vous promener à Lagos dans le square qui porte son nom, le square Tinubu, ou à Abeokuta dans le square Iyalodé.
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