jeudi 8 mars 2012

Les chiffres hallucinants des travailleuses de la terre


Journée internationale de la femme

Les conditions de vie des femmes rurales dans les pays en développement restent très inquiétantes, souligne un rapport des Nations Unies en lien avec la Journée internationale de la femme du 8 mars. Extraits.

Par Sandrine Perroud. Mis à jour à 07h29
Alors qu’elles sont les premières à exploiter la terre, les femmes en restent encore rarement propriétaires. Une exploitation dans les environs de Calcutta, en Inde.

Alors qu’elles sont les premières à exploiter la terre, les femmes en restent encore rarement propriétaires. Une exploitation dans les environs de Calcutta, en Inde.
Image: Keystone


Les femmes travaillant dans l’agriculture jouent un rôle crucial dans l’économie mondiale. Dans certaines régions du monde, elles constituent les deux tiers de la main-d’œuvre agricole.

Pourtant les inégalités entre hommes et femmes sont encore patentes dans les pays en développement. D'autant plus dans les zones rurales. Le sujet fait ainsi l'objet d'une table ronde depuis le 27 février aux Nations Unies, à l'occasion de la Journée de la femme du 8 mars.

Dans un rapport exhaustif, l'Organisation des Nations Unies pour l'agriculture et l'alimentation (FAO) dresse un portrait alarmant de leurs conditions de vie.

On y apprend que les femmes vivant en zones rurales constitueraient en moyenne 43% des travailleurs agricoles dans le monde. En Asie du Sud, elles sont 70% des personnes à pratiquer ce métier, contre 60% en Afrique sub-saharienne.

Pas de leadership

Ces travailleuses n’ont toutefois pas accès aux mêmes ressources productives que les hommes. Si tel était le cas, l’ONU estime que la faim dans le monde pourrait être réduite de 12% à 17% environ, soit de 100 à 150 millions de personnes.

Alors qu’elles sont les premières à exploiter la terre, les femmes en restent encore rarement propriétaires. Moins de 20% des propriétaires fonciers dans le monde seraient ainsi représentés par des femmes (5% en Afrique du Nord et 15% en Afrique sub-saharienne).

Leur leadership est d'autant plus absent que ces femmes siègent très rarement aux conseils ruraux de leur région. Le Bangladesh et le Cambodge affichent respectivement 0,2% et 7% de présence féminine. Leur pouvoir de décision est donc quasi nul.

Récolte de l’eau

Quel est donc le travail effectué par ces femmes, se demande encore le rapport de l'ONU? La récolte de l’eau et du carburant – sur de longues distances à pied - occuperait une bonne partie de leurs journées. En Sierra Leone, les femmes passent en moyenne 7,3 heures à cette tâche contre 4,5 pour les hommes. Des chiffres encore plus disproportionnés proviennent du Malawi, avec 9,1 heures pour les femmes, contre 1,1 heure pour les hommes. Cette répartition inégales des tâches empêche les femmes d’accéder un emploi plus qualifiant, souligne l'enquête.

En plus d'être reléguées à des tâches ingrates, les femmes qui travaillent en zones rurales accomplissent des journées plus longues que les hommes. Au Bénin et en Tanzanie, elles travaillent en moyenne 17,4 heures et 14 heures par semaine de plus, car elles cumulent leur emploi aux tâches ménagères qu'elles assument généralement entièrement.

Finalement, ces femmes ont de plus grandes chances de n’occuper que des emplois saisonniers, à temps partiel ou inégalement payés par rapport aux hommes.

Cette inégalité est doublement à déplorer, souligne le rapport, car les recherches montrent que l’augmentation du salaire des femmes se répercute sur l’amélioration de la nutrition et de l’éducation de leurs enfants.

Deux tiers d'analphabètes

Peut-être tout vient-il de là: les femmes constituent encore plus de deux tiers des personnes analphabètes dans le monde. Les fillettes nées dans les zones agricoles sont les dernières à être scolarisées, moins que leurs frères (39% contre 45%) et bien après les enfants issus de milieux urbains (60% d'entre eux sont scolarisés).

L’accès à l’éducation leur permet pourtant d’éviter beaucoup d’injustices: chaque année supplémentaire passée sur les bancs d’école augmenterait le futur salaire des femmes de 10 à 20%, tout en diminuant leurs risques d’être exposées aux violences domestiques.

Car les chiffres sont aussi alarmants de ce côté-ci. Les femmes rurales victimes de violences ne cherchent que rarement de l’aide. Leur santé est plus généralement en danger que celle des femmes urbaines.

Inégales devant le sida

Elles comprennent moins bien par exemple comment se transmet le sida (20% contre 50% pour les femmes habitant en ville), ce qui les expose d’autant plus à cette maladie. Enfin, ce sont elles qui prennent soin des malades, lorsque leur entourage est touché. Une tâche domestique qui vient s'accumuler aux autres.

Que faire face à tant d’inégalités? Difficile à dire. Actuellement, seuls 3% des 7,5 milliards de dollars alloués par la communauté internationale au développement des zones rurales sont versés aux programmes visant l’égalité des sexes.

(Newsnet)

Créé: 08.03.2012, 07h29

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